REGIME POLITIQUE DES PROVINCES ET INSTABILITE DES GOUVERNEMENTS PROVINCIAUX : FAUT-IL SUPPRIMER LES ASSEMBLEES PROVINCIALES OU REFORMER LEUR POUVOIR DE VOTE DE MOTION DE CENSURE OU DE DEFIANCE?

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Par NSOLOTSHI MALANGU

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REGIME POLITIQUE DES PROVINCES ET INSTABILITE DES GOUVERNEMENTS PROVINCIAUX : FAUT-IL SUPPRIMER LES ASSEMBLEES PROVINCIALES OU REFORMER LEUR POUVOIR DE VOTE DE MOTION DE CENSURE OU DE DEFIANCE?

INTRODUCTION

La constitution de la République démocratique du Congo du 18 février 2006 a institué deux échelons du pouvoir politique de l’Etat. D’une part, pour l’ensemble du Pays, il y a un pouvoir central divisé en pouvoir politique législatif exercé par le parlement (Assemblée Nationale et le Sénat) et le pouvoir politique exécutif assuré par le Président et le Gouvernement de la République. D’autre part, chaque subdivision du pays appelée province détient un pouvoir politique étatique divisé en pouvoir législatif exercé par l’assemblée provinciale et le pouvoir exécutif exercé par le gouvernement de la Province.

D’après ce système politique, le gouvernement central dirige selon la volonté de la majorité politique à l’Assemblée nationale car le premier Ministre chef du Gouvernement est nommé par le Président de la République au sein de la majorité parlementaire ; celle-ci investit le gouvernement central par approbation de son programme et le cas échéance, elle lui retire sa confiance par le vote d’une motion de censure ou de défiance.

Dans le même sens, le Gouvernement de la Province dépend largement de l’Assemblée Provinciale qui, d’une part, élut le Gouverneur et le vice-gouverneur de Province et investit les ministres provinciaux. D’autre part, l’Assemblée Provinciale peut retirer sa confiance au Gouverneur de Province ou à tout autre membre du Gouvernement provincial par le vote d’une motion de censure ou de défiance.

Cependant, depuis l’application de ce régime politique dans les Provinces (de 2006 à nos jours), l’on constate en fait une instabilité grandissante des gouvernements provinciaux. Cette instabilité est caractérisée par le vote intempestif des motions de censure ou défiance contre les gouvernements provinciaux et les Gouverneurs de province au point que le développement régional recherché par ce régime politique est quasiment hypothéqué. Cette situation inquiète et les avis vont dans tous les sens. On se demande généralement, s’il faut carrément supprimer les assemblées provinciales ou supprimer leur pouvoir de vote de motion de censure et de défiance contre le Gouverneur et les membres du Gouvernement provincial ?

La représente réflexion est une participation scientifique au débat et aussi une ébauche de théorisation du régime politique des Provinces en République démocratique.

Pour bien comprendre le contour de la question, rappelons d’abord l’essentiel des notions de Province et de régime politique provincial en République Démocratique Congo avant d’évoquer les causes et remèdes de l’instabilité des gouvernements provinciaux.

I°. STATUT ET REGIME POLITIQUE DE PROVINCE EN RDC

I.1. NATURE DE LA PROVINCE : une subdivision territoriale de la République dotée de la personnalité juridique, des pouvoirs et compétences politiques propres.

En République démocratique du Congo, la province est une première subdivision territoriale du pays à laquelle la constitution accorde la personnalité juridique ainsi que les pouvoirs et les compétences étatiques propres. La République a donc deux niveaux du pouvoir étatique : le pouvoir central qui s’exerce sur l’ensemble du pays et le pouvoir de la Province qui s’exerce dans les limites territoriales de la Province.

À ce propos, l’article 2 de la loi n°08/012 du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces, dispose que « la province est une composante politique et administrative du territoire de la République. Elle est dotée de la personnalité juridique. Elle jouit de l’autonomie de gestion de ses ressources humaines, économiques, financières et techniques. Elle exerce, par ses institutions politiques, les compétences qui lui sont dévolues par la Constitution. Elle coopère avec les autres provinces et le pouvoir central dans le cadre du fonctionnement régulier des institutions ».

Selon l’article 2 de la constitution du 18 février 2006, « la République Démocratique du Congo est composée de la ville de Kinshasa et de 25 provinces dotées de la personnalité juridique. Ces provinces sont : Bas-Uele, Equateur, Haut-Lomami, Haut-Katanga, Haut-Uele, Ituri, Kasai, Kasai Oriental, Kongo central, Kwango, Kwilu, Lomami, Lualaba, Kasaï Central, Mai-Ndombe, Maniema, Mongala, Nord-Kivu, Nord-Ubangi, Sankuru, Sud-Kivu, Sud-Ubangi, Tanganyika, Tshopo, Tshuapa ». On peut retenir donc de cette disposition que la République démocratique du Congo comprend au total 26 provinces.

Relevons cependant que la personnalité juridique de la province signifie qu’elle a des droits et des obligations et qu’elle peut agir par elle-même pour les appliquer, les défendre et les faire respecter.   Ainsi, la province peut par ses propres organes, prendre des actes juridiques qui engagent sa responsabilité, signer des contrats, avoir un patrimoine mobilier et immobilier, avoir des dettes et des créances envers les tiers, ester et se défendre en justice par elle-même devant les cours et tribunaux, sans que cela n’implique ni ne concerne directement la République ou toute autre personne juridique.

Outre la personnalité juridique, la province est dotée des pouvoirs et des compétences étatiques ou politiques propres et distincts de ceux de la République. En effet, la Province dispose du pouvoir législatif (de faire les lois propres à elle) et le pouvoir d’exécuter son propre programme d’actions et les projets de développement. Ces deux pouvoirs étatiques sont formellement représentés par deux organes : l’assemblées provinciale et le Gouvernement de la Province. Sous réserve des nuances que nous développons un peu plus loin, ces deux organes provinciaux ne dépendent aucunement du pouvoir de la République.

Enfin, la Province a des compétences propres pour lesquelles le pouvoir de la République ne peut constitutionnellement intervenir.

I.2. LES COMPETENCES DES PROVINCES PAR RAPPORT AU POUVOIR CENTRAL

a°) Les compétences exclusives des provinces.

Les compétences exclusives des provinces sont celles dans lesquelles la Province peut agir seule sans intervention ou hiérarchie possible de le République. Elles sont prévues par l’article 204 de la Constitution.

D’après cet article, sont de la compétence exclusive des provinces :

« 1. le plan d’aménagement de la province ; 2. la coopération interprovinciale ; 3. la fonction publique provinciale et locale ; 4. l’application des normes régissant l’état civil ; 5. les finances publiques provinciales ; 6. la dette publique provinciale ; 7. les emprunts intérieurs pour les besoins des provinces ; 8. la délivrance et la conservation des titres immobiliers dans le respect de la législation nationale ; 9. l’organisation du petit commerce frontalier ; 10. l’organisation et le fonctionnement des services publics, établissements et entreprises publics provinciaux dans le respect de la législation nationale ; 11. les travaux et marchés publics d’intérêt provincial et local ; 12. l’acquisition des biens pour les besoins de la province ; 13. l’enseignement maternel, primaire, secondaire, professionnel et spécial ainsi que l’alphabétisation des citoyens, conformément aux normes établies par le pouvoir central ; 14. l’établissement des peines d’amende ou de prison pour assurer le respect des édits en conformité avec la législation nationale ; 15. les communications intérieures des provinces ; 16. les impôts, les taxes et les droits provinciaux et locaux, notamment l’impôt foncier, l’impôt sur les revenus locatifs et l’impôt sur les véhicules automoteurs ; 17. la fixation des salaires minima provinciaux, conformément à la législation nationale ; 18. l’affectation du personnel médical, conformément au statut des agents de carrière des services publics de l’Etat, l’élaboration des programmes d’assainissement et de campagne de lutte contre les maladies endémo-épidémiques conformément au plan national : l’organisation des services d’hygiène et de prophylaxie provinciale, l’application et le contrôle de la législation médicale et pharmaceutique nationale ainsi que l’organisation des services de la médecine curative, des services philanthropiques et missionnaires, des laboratoires médicaux et des services pharmaceutiques, l’organisation et la promotion des soins de santé primaires ; 19. l’élaboration des programmes miniers, minéralogiques, industriels, énergétiques d’intérêt provincial et leur exécution conformément aux normes générales du planning national ; 20. l’élaboration des programmes agricoles et forestiers et leur exécution conformément aux normes du planning national, l’affectation du personnel agricole, des cadres conformément aux dispositions du statut des agents de carrière des services publics de l’Etat, l’application de la législation nationale concernant l’agriculture, la forêt, la chasse et la pêche ainsi que l’environnement, la conservation de la nature et la capture des animaux sauvages, l’organisation et le contrôle des campagnes agricoles, la fixation des prix des produits agricoles ; 21. l’affectation en province du personnel vétérinaire, conformément au statut des agents de carrière des services publics de l’Etat; l’élaboration des programmes de campagne de santé animale et l’application des mesures de police sanitaire vétérinaire, notamment en ce qui concerne les postes frontaliers et de quarantaine ; 22. l’organisation des campagnes de vaccination contre les maladies enzootiques, l’organisation des laboratoires, cliniques et dispensaires de la provenderie ainsi que l’application de la législation nationale en matière vétérinaire, l’organisation de la promotion de santé de base ; 23. le tourisme, le patrimoine historique, les monuments publics et les parcs d’intérêt provincial et local ; 24. l’habitat urbain et rural, la voirie et les équipements collectifs provinciaux et locaux ; 25. l’inspection des activités culturelles et sportives provinciales ; 26. l’exploitation des sources d’énergie non nucléaire et la production de l’eau pour les besoins de la province ; 27. l’exécution des mesures du droit de résidence et d’établissement des étrangers, conformément à la loi ; 28. l’exécution du droit coutumier ; 29. la planification provinciale ».

En résumé, les compétences exclusives de provinces concernent : 1. les planifications et programmations des actions de la Province ; 2. Les finances publiques de la Province ; 3. la création et l’organisation des services publics de la Province ainsi que la fonction publique provinciale (statuts des agents publics de la Province) ; 4. La gestion des marchés publics provinciaux et la réalisations des projets et infrastructures de la Province ; 5. L’exécution ou mise en œuvre des coutumes, spécialement les coutumes et usages d’occupation des terres ainsi que les coutumes d’exercice des pouvoirs coutumiers ; 6. La communication intérieure de la Province et la coopération interprovinciale ; 7. Les interventions spécifiques dans les domaines de la vie nationale : enseignement primaire, secondaire et professionnel, l’état civil, affectation des agents médicaux et vétérinaires,  les campagnes de vaccination, le tourisme, l’habitat, la délivrance et conservation des certificats d’enregistrement et autres titres fonciers,  l’inspection des activités sportives et culturelles, l’exploitation des sources énergétiques non nucléaires notamment l’eaux et l’exécution des mesures nationales sur l’établissement et la résidence des étrangers.

Ces compétences exclusives des provinces ne signifient pas que celles-ci sont libres de décider ce qu’elles veulent sans aucune référence à la République. L’autonomie n’est pas l’indépendance ni la souveraineté. En effet, les provinces ont simplement le pouvoir de décision dans ces domaines mais les contenus devraient néanmoins se conformer aux les lois et règlements de la République conformes à la constitution.  Par exemple, en matière des finances publiques de la Province, la compétence exclusive de la Province signifie qu’elle est seule compétente pour élaborer le budget de la Province, déterminer la hauteur et les formes de recouvrement des recettes ainsi que l’engagement et l’exécution des dépenses. Cependant, la province doit se conformer aux lois de la République sur les principes budgétaires, la comptabilité publique et la justice des finances publiques rendue par la cour des comptes.

Il faut également souligner que certaines compétences exclusives des provinces sont rattachées aux domaines des compétences exclusives du pouvoir central notamment les compétences d’exécutions des mesures se rapportant aux compétences aux domaines ministériels nationaux. C’est le cas des compétences exclusives des provinces dans les domaines de l’enseignement, des affaires foncières, de l’habitat, de la police et conditions des étrangers, etc.  Dans ce cas, les compétences exclusives de la Province sont assurées dans le respect des instructions du pouvoir central.

b°) les compétences concurrentes des provinces avec le pouvoir central

Outre les compétences exclusives, la Province a aussi les compétences concurrentes. Pour ces compétences, la République et la Province peuvent chacun décider. Cependant, la Province n’intervient que si le Pouvoir central n’a pas expressément disposé.  

Selon l’article 203 de la constitution, les compétences concurrentes comprennent :

« 1. la mise en œuvre des mécanismes de promotion et de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales consacrés dans la Constitution; 2. les droits civils et coutumiers ; 3. les statistiques et les recensements ; 4. la sûreté intérieure ; 5. l’administration des cours et tribunaux, des maisons d’arrêt et de correction et des prisons; 6. la vie culturelle et sportive ; 7. l’établissement des impôts, y compris les droits d’accise et de consommation, à l’exclusion des impôts visés à l’article 174 ; 8. l’exécution des mesures sur la police des étrangers ; 9. la recherche scientifique et technologique ainsi que les bourses d’études, de perfectionnement et d’encouragement à la recherche ; 10. les institutions médicales et philanthropiques, l’engagement du personnel médical et agricole de commandement ; 11. la mise en œuvre des programmes de la météorologie, de la géologie, de la cartographie et de l’hydrologie ; 12. les calamités naturelles ; 13. la presse, la radio, la télévision, l’industrie cinématographique ; 14. la protection civile ; 15. le tourisme ; 16. les droits fonciers et miniers, l’aménagement du territoire, le régime des eaux et forêts ; 17. la prévention des épidémies et épizooties dangereuses pour la collectivité ; 18. la protection de l’environnement, des sites naturels, des paysages et la conservation des sites ; 19. la réglementation sur les régimes énergétiques, agricoles et forestiers, l’élevage, les denrées alimentaires d’origine animale et végétale ; 20. la création des établissements primaires, secondaires, supérieurs et universitaires 21. le trafic routier, la circulation automobile, la construction et l’entretien des routes d’intérêt national, la perception et la répartition des péages pour l’utilisation des routes construites par le pouvoir central et/ou par la province ; 22. les institutions médicales et philanthropiques ; 23. l’initiative des projets, programmes et accords de coopération économique, culturelle, scientifique et sociale internationale ; 24. la production, le transport, l’utilisation et l’exploitation de l’énergie ; 25. la protection des groupes des personnes vulnérables ».

Pour la plupart, ces compétences font objet des ministères, des lois, règlements et instruction du pouvoir central au point que les provinces n’y ont plus un grand champ libre pour décider autonome si ce n’est pour mettre en œuvre les instructions et orientations du pouvoir central.    

c°) Interdiction pour les provinces d’agir dans les domaines de compétences exclusives du pouvoir central.

Du reste, la Province ne peut intervenir dans les domaines de la compétence exclusive du pouvoir central. Ces compétences comprennent les matières les plus importantes et plus sensibles de la vie nationale telles que : 1. affaires étrangères, relations diplomatique et commerce extérieur ; 2. nationalité et police des étrangers, l’extradition, la migration, le passeports et les visas ; 3. La sureté extérieure,  défense et police nationale ; 4. Les finances publiques nationale, douanes et impôts du pouvoir central ; 5. l’émission de la monnaie et gestion des banques ; 6. les postes et télécommunications ; 7. la navigation maritime, lignes aériennes et chemin de fer ; 8. Les établissements supérieurs et universitaires et recherches scientifiques du niveau national ; 9. Les marchés publics et infrastructures du niveau national, les planifications et programmes nationaux ; 10. les lois en matière : électorales, pénales, du commerce, d’importation et d’exportation, d’organisation et compétence judiciaire ; du travail et de professions libérales, des mines et carrières, des eaux et autres ressources naturelles, des législations médicales et sur les fécondations artificielles et manipulation génétique ; les lois sur l’exercice des arts et métiers, et les lois sur les réfugiés et les expulsions. (Art 202 de la constitution).

Toutefois, les provinces sont chargées d’exécutions des lois et règlements de la Républiques et à ce titre ils peuvent intervenir dans ces secteurs de compétences exclusives du pouvoir central. À cet effet, l’article 206 de la constitution dispose clairement que « sauf dispositions contraires de la législation nationale, les gouvernements provinciaux exécutent, par l’intermédiaire de leurs services, les lois et les règlements nationaux ».

d°) Le principe de séparation entre le pouvoir central et le pouvoir des provinces

Au regard des dispositions qui précèdent, il ressort que la constitution a fait de la province un Etat-régional[1] proche d’un Etat -fédéré à la différence qu’elle ne lui reconnait pas le pouvoir d’avoir une constitution propre, le pouvoir judiciaire et des compétences larges, sensibles et résiduelles. Le propre du régionalisme est de doter à l’Etat régional l’autonomie[2] législative et gouvernemental.

Ainsi, la constitution du 18 février 2006 consacre la séparation des pouvoirs politiques entre la République et la province. D’une part, pour la République, il y a un parlement bicaméral avec deux chambre (l’Assemblée nationale et le Sénat) et l’exécutif bicéphale avec deux organes (la présidence de la République et le Gouvernement central). D’autre part, en Province, il y a l’assemblée provinciale et le Gouvernement provincial. Les champs d’intervention de chaque pouvoir est déterminé par les articles 202, 203 et 204 de la constitution.

À cet effet, il est interdit, au pouvoir central d’intervenir sur les compétences exclusives des Provinces et à ces dernières d’agir sur les compétences exclusives du niveau central. Sur le plan constitutionnel, les édits de la Province pris dans les domaines de la compétence exclusives de la province ont la force juridique des lois de la République. Tout empiètement est sanctionné par l’annulation prononcée par la cour constitutionnelle. Dans les domaines de la compétence concurrentes, les lois de la République priment sur les édits des provinces. L’avant dernier alinéa de l’article 205 de la constitution dispose que « dans les matières relevant de la compétence concurrente du pouvoir central et des provinces, tout édit provincial incompatible avec les lois et règlements d’exécution nationaux est nul et abrogé de plein droit, dans la mesure où il y a incompatibilité ». En cette matière de la compétence concurrente, la législation nationale prime sur l’édit provincial.  

Pour confirmer le principe de séparation, il est établi un mécanisme juridictionnel de règlement des conflits entre la République et la Province. En effet, l’article 72 de loi de libre administration des provinces, dispose que « la Cour constitutionnelle connaît des conflits de compétence entre l’Etat et les provinces conformément à l’article 161 de la Constitution ». L’alinéa 3 de l’article 161 de la constitution prévoit que « elle (la cour constitutionnelle) connaît des conflits de compétences entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif ainsi qu’entre l’Etat et les provinces ».

Traitant de règlement des conflits entre l’Etat et les provinces, les articles 61 à 64 de la loi n° 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle disposent respectivement que « la Cour (constitutionnelle) connaît des conflits de compétence entre l’Etat et les Provinces ; « il y a conflit de compétences lorsque l’un des actes énumérés à l’article 43 de la présente Loi organique (ces actes sont : traité ou accord international, Loi, acte ayant force de Loi, édit ou Règlement Intérieur) est pris en violation des articles 202 à 205 de la Constitution ; « la Cour statue sur saisine des autorités ou du groupe d’autorités citées à l’article 54 de la présente Loi organique (ces autorités sont : Président de la République, Gouvernement, Président du Sénat, Président de l’Assemblée Nationale, un dixième des membres de chacune des Chambres parlementaires, Gouverneurs de Province et Présidents des Assemblées Provinciales) ; « elle (la cour constitutionnelle) se prononce sur l’échelon du pouvoir compétent ; « dans les matières relevant de la compétence concurrente entre l’Etat et les Provinces, énumérées à l’article 203 de la Constitution, tout édit incompatible avec les Lois et les règlements nationaux est nul de plein droit ».

Il y a lieu de noter que la constitution et le régime politique qu’elle consacre séparent nettement le pouvoir politique de la province et celui de la République. L’édit adopté dans le domaine de la compétence exclusive de la Province, ne peut en principe être annulé pour inconformité à la loi de la République sauf application de la théorie de la loi-écran constitutionnelle. La Cour constitutionnelle connaît de la constitutionnalité des édits comme de la constitutionnalité des lois de la République. (Art 73 de la loi de libre administration de Province)

Toutefois, il importe de préciser que cette séparation ne concerne pas le pouvoir judiciaire que la constitution rend indépendant aux pouvoirs politiques. De même, cette séparation n’est pas très rigide lorsqu’il s’agit de l’exécutif du pouvoir central et celui de la Province. En effet, si les domaines d’intervention de l’exécutif provincial est distinct de celui du pouvoir central, il faut constater néanmoins que le Gouverneur de Province est à la fois chef de l’exécutif provincial et en même temps, représentant du pouvoir central en Province (Cfr infra et les articles 61 à 70 de la loi de libre administration des provinces). Ainsi, le Président de la République peut révoquer le Gouverneur de province lorsqu’il viole les lois et règlements de la République (art 198 de la constitution telle que révisée en 2011 et l’article 28 bis de la loi de libre administration des provinces telle que modifiée et complétée en 2013).  

Par ailleurs, la constitution institue la conférence des Gouverneurs comme organe permettant l’harmonisation des vues entre l’exécutif national et les gouverneurs de provinces ainsi que l’uniformisation des édits et instructions dans les différentes provinces.[3]

En ce qui concerne le parlement provincial et le parlement national, la séparation est plus ou moins nette : il n’y a pas d’organe de rapprochement ni missions communes. La seule collaboration est que l’un peut habileté l’autre à légiférer sur ses compétences exclusives et que les représentants de ces deux niveaux peuvent échanger entre eux ou avec le président des chambres d’un autre niveau. (Article 205 de la constitution et l’article 61 de la loi de libre administration des Provinces). L’assemblée provinciale n’a donc pas de hiérarchie au niveau national qui puisse lui dicter une orientation ou la sanctionner en dehors de la collaboration formelle ou informelle pour raison d’intérêt public de l’Etat ainsi que la possibilité de dissolution de l’Assemblée provinciale par le Président de la République en cas de crise grave et persistante. (Article 19 alinéa 2, de la loi de libre administration de province telle que modifiée et complétée en 2013).

Les considérations qui précèdent nous ont permis de comprendre le statut de la province dans ses rapports avec le pouvoir central. Du reste, il importe de comprendre le pouvoir politique de la Province dans son fonctionnement interne. C’est ce qu’on peut appeler régime politique des provinces.

I.3. LE REGIME POLITIQUE DES PROVINCES

Par régime politique des provinces, on sous-entend la façon dont le pouvoir politique provincial est organisé et fonctionne à l’intérieur de la Province.

Pour rappel, la constitution de la RDC rattache le pouvoir de l’Etat à deux échelons distincts : au niveau de l’ensemble du pays, il y a le pouvoir central et au niveau de la Province, il y a le pouvoir provincial. Cette forme de l’Etat proche du fédéralisme[4] et qui est qualifiée par les auteurs de régionalisme constitutionnel[5] ou décentralisation régionale[6] se caractérise d’un côté, par la prépondérance du pouvoir central sur le pouvoir des provinces et de l’autre côté, par la consécration des compétences exclusives des provinces lesquelles sont exercées par les institutions propres à la Province.

Dans ce régionalisme [7], la Province se voit confier par la constitution, un pouvoir étatique autonome mais inférieur par rapport au pouvoir central. En outre, il existe entre les deux échelons du pouvoir de l’Etat, une étroite collaboration traduite par la permanence du pouvoir central dans la province et la double casquette du Gouverneur de Province qui est à la fois animateur principal du pouvoir exécutif de Province et représentant du pouvoir central.

Le pouvoir étatique de la Province est donc incarné par deux institutions : l’Assemblée Provinciale et le Gouvernement Provincial.

I.3.1. L’ASSEMBLEE PROVINCIALE

A°. NATURE JURIDIQUE ET COMPOSITION DE L’ASSEMBLEE PROVINCIAL

Selon les articles 197 et 198 de la constitution et les articles 7 et suivants de la loi de libre administration des provinces, l’assemblée provinciale est un organe politique de la province, chargé d’élire les gouverneurs et les sénateurs, de légiférer sur les matières de la compétence de la Province et de contrôler le gouvernement provincial ainsi que les services publics provinciaux et locaux.

La nature politique de l’assemblée provincial résulte d’une part, du fait que ses membres sont choisis en fonction de leurs convictions et appartenances politiques et d’autre part, par la nature de leur triple mission principale d’élire les autorités politiques, d’édicter les règles devant régir la province et de contrôler le gouvernement provincial.

L’assemblée provincial est composée des membres appelés : députés provinciaux ; ils sont élus par le peuple au suffrage universel direct pour un mandat de 5 ans. Les députés provinciaux sont donc les représentants de tous les citoyens de la province et exercent leurs missions au nom de la population provinciale mais sans obligation de recevoir ni obéir aux injonctions des citoyens ou de leurs partis politiques. On dit en droit qu’ils ont un mandat non impératif.

Le nombre de députés provinciaux à élire dans chaque ville ou territoire de la Province, varie en fonction du nombre des citoyens électeurs. Ainsi, les nombre de députés provinciaux est différent d’une province à une autre en fonction du nombre de territoires et de villes qu’elle comprend ainsi que du nombre des citoyens électeurs enrôlés. (Lire les articles 145 et 146 de la loi électorale). Outre les députés provinciaux élus, il y a des députés provinciaux cooptés et dont le nombre est d’environ dix pourcents de députés provinciaux dans l’ensemble. La durée du mandat et les droits parlementaires des députés cooptés sont les mêmes que ceux de députés provinciaux élus. (Article 197 de la constitution).

L’assemblée provinciale statue principalement par la majorité de voix des membres. Elle siège périodiquement pendant 3 mois consécutifs qui constituent une session parlementaire. Au cours de la session, l’assemblée provinciale exécute ses missions traditionnelles. La session est suivie de 3 mois de repos ou vacances ; ce qui donne 2 sessions parlementaires ou 6 mois de travail par an. Pendant les 6 mois de vacances parlementaires, le bureau assure l’administration de l’assemblée provinciale sans exécuter ses missions principales.

L’assemblée provinciale exerce principalement 3 Missions :

  • Élire les gouverneurs (et vice-gouverneurs) de Province, les sénateurs et les membres du bureau de l’assemblée provinciale (fonctions électives) ;
  • Voter les lois de la province appelées « édits » (fonction législative) ;
  • Contrôler le Gouvernement Provincial ainsi que les services publics provinciaux et locaux et le cas échéant, destituer par motion de censure ou de défiance un ou plusieurs membres du Gouvernement Provincial (fonction de contrôle et de censure). Articles 197 et 198 de la constitution et les articles 7 et suivants de la loi de libre administration des provinces.[8]

B°. FONCTIONS ELECTIVES DE L’ASSEMBLEE PROVINCIALE

L’assemblée provinciale, une fois installée, élut les membres du bureau chargés de la diriger : un président, un vice-président, un rapporteur, un rapporteur-adjoint et un questeur.

Le bureau de l’assemblée provinciale n’est chargé que des tâches administratives et de représentation de l’institution notamment : recruter le personnel d’appoint de l’assemblée, diriger les débats en réunion, gérer les fonds alloués à l’assemblée, réceptionner, archiver et expédier les courriers et documents de l’assemblées, communiquer les décisions, avis et considérations de l’assemblée, représenter l’assemblée devant les tiers, faire respecter les dispositions du règlement intérieur, etc.

Le bureau ne peut se substituer à l’assemblée provinciale pour exercer ses missions traditionnelles ; il ne peut ni élire le gouverneur et sénateur, ni voter les édits, ni contrôler et sanctionner le gouvernement de la Province. Un règlement intérieur définit le fonctionnement interne de chaque assemblée provinciale.

Outre l’élection des membres du bureau de l’assemblée Provinciale, les députés provinciaux élisent aussi les sénateurs et les Gouverneurs de Province conformément au calendrier électoral de la commission électorale nationale indépendante (CENI). Articles 104 alinéa 4 et 198 alinéa 2 de la constitution.

C°. FONCTION LEGISLATIVE DE L’ASSEMBLE PROVINCIALE

L’assemblée provincial est chargée de légiférer, c’est-à-dire d’adopter les lois dans les domaines de la compétence de la Province. Les lois édictées par l’assemblée provinciale sont appelées EDITS. Cette fonction constitue la mission fondamentale et primordiale de l’assemblée provinciale.

Selon l’articles 204 de la constitution du 18 février 2006 combiné avec l’article 35 de la loi n°08/012 du 31 juillet 2008­ portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces (tels que modifiés à ce jour) ; l’assemblée provinciale vote les édits dans les domaines ci-après : « 1. Le plan d’aménagement de la province; 2. la fonction publique provinciale et locale; 3. la dette publique provinciale; 4. les finances publiques provinciales; 5. les emprunts intérieurs pour les besoins de la province; 6. les travaux et marchés publics d’intérêt provincial et local; 7. l’enseignement maternel, primaire, secondaire, professionnel et national ainsi que l’alphabétisation des citoyens conformément aux normes établies par le pouvoir central; 8. l’établissement des peines d’amende ou de prison pour assurer le respect des édits en conformité avec la législation nationale; 9. les taxes et les droits provinciaux et locaux, notamment l’impôt foncier, l’impôt sur les revenus locatifs et l’impôt sur les véhicules automoteurs; 10.la production de l’eau pour les besoins de la province; 11.la planification provinciale ».

Par ailleurs, selon l’articles 203 de la constitution du 18 février 2006 combiné avec l’article 36 de la loi n°08/012 du 31 juillet 2008­ portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces (tels que modifiés à ce jour), l’assemblée provincial peut lorsqu’il n’existe pas de législation nationale, voter les édits dans les domaines suivants relevant de la compétence concurrente : « 1. la mise en œuvre des mécanismes de promotion et de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales consacrés dans la Constitution; 2. les droits civils et coutumiers; 3. l’établissement des impôts, y compris les droits d’accise et de consommation, à l’exclusion des impôts établis par la loi nationale ; 4. la recherche scientifique et technologique ainsi que les bourses d’études, de perfectionnement et d’encouragement à la recherche; 5. la presse, la radio, la télévision, l’industrie cinématographique; 6. la protection civile; 7. les droits fonciers et miniers, l’aménagement du territoire, le régime des eaux et forêts; 8. la réglementation sur les régimes énergétiques, agricoles et forestiers, l’élevage, les denrées alimentaires d’origine animale et végétale; 9. la création des établissements primaires, secondaires, supérieurs et universitaires; 10.les institutions médicales et philanthropiques; 11.la production, le transport, l’utilisation et l’exploitation de l’énergie; 12.la protection des groupes des personnes vulnérables; 13.la protection de l’environnement, des sites naturels, des paysages et la conservation des sites; 14.le trafic routier, la circulation automobile, la construction et l’entretien des routes d’intérêt national, la perception et la répartition des péages pour l’utilisation des routes construites par le pouvoir central et/ou par la province ».

Il ressort de ce qui précède que l’assemblée provinciale légifère dans les domaines : de la planification et programmation provinciale, des finances publiques, des impôts, droits, taxes et redevances dus à la Province, des marchés publics provinciaux, de la fonction publique provinciale, de la production d’eau en Province et de l’établissement des peines contre les violations des édits. La loi nationale et les règlements ne peuvent établir pareilles règles.

En pratique, le pouvoir central établit des règles générales de forme à titre d’exécution de la constitution. Il en est ainsi par exemple des lois nationales sur l’élaboration des budgets des provinces, sur la nomenclature des impôts, droits, taxes et redevances dus aux provinces, sur les principes fondamentaux des procédures et des contrôles des marchés publics provinciaux, la loi sur l’eau qui traite de la production de l’eau notamment en province, etc. Ces lois nationales s’imposent tant qu’ils sont conformes à la constitution.

Exceptionnellement, dans les matières dites concurrentes, l’assemblée provinciale peut voter les édits s’il n’y a pas de législation nationale suffisante.

Les domaines de compétences exclusives ou concurrentes des provinces qui ne relèvent pas des édits, sont règlementés par les arrêtés du Gouverneur ou des ministres provinciaux. Il en est ainsi par exemple du domaine de création et organisation des services publics provinciaux ainsi que de l’organisation et exécution des coutumes, notamment les coutumes d’occupation foncière et les coutumes du pouvoir des entités traditionnelles. Il en est de même de la règlementation de la délivrance et conservation des certificats d’enregistrements et autres titres fonciers ; le régime de gestion de l’habitat et du tourisme, … pour autant que ces règles soient conformes à la législation nationale. Art 37 de la loi de libre administration des Provinces.

D°. FONCTION DE CONTRÔLE ET DE CENSURE

1°. Le contrôle du Gouvernement, des services provinciaux et locaux par l’assemblée provinciale

L’assemblée provincial contrôle des actions du gouvernement Provincial, des services provinciaux et de services locaux de locaux de la Province. Ce contrôle porte sur les actions telles qu’elles sont définies dans les plans, programmes, budgets, édits, recommandations et résolutions votés par l’assemblée provinciale[9]. Il en est ainsi des actions du Gouvernement provincial en rapport avec la mobilisation des recettes définies au budget, l’engagement et l’exécution dépenses prévues au budget de la Province. C’est aussi le cas des actions du gouvernement provincial en rapport avec le programme d’actions annuelles, biannuelles ou même quinquennale approuvé par l’assemblée notamment sur la fonction publique provinciale, l’exécution de certains projets et la réalisations des infrastructures. C’est encore le cas des actions que devraient poser le gouvernement provincial en rapport avec les édits votés par l’assemblée provinciales notamment sur le respect des procédures d’engagement et d’exécution des dépenses de la Province, le respect de délai de transmission des états financiers, le respect des procédures de conclusions de marchés publics, etc.

Comme on le voit, au nom du principe de séparation du pouvoir central et celui de la province, les contrôles de l’assemblée provinciale doit rester dans les limites du pouvoir et des compétences de la Province. Ils ne peuvent concerner les compétences du pouvoir central ni les actions d’exécution des lois et règlements de la République sans rapport avec les programmes et édits de la Province. Ainsi, l’assemblée provincial ne peut contrôler par exemple les interventions du gouvernement provincial dans une situation de guerre, de sécurité, de maintien de l’ordre public ou d’encadrement des établissements universitaires tant qu’elles ne sont pas reprises dans les programmes et édits de la Province.

En plus, selon l’article 7 de la loi sur la libre administration des provinces et en vertu du principe de séparation du pouvoir central et du pouvoir provincial, l’assemblée provinciale n’a pas mission de contrôler les services publics du pouvoir central installés en Province (les divisions et bureaux déconcentrés des ministères nationaux) sauf lorsque ces services sont chargés des missions relevant des compétences exclusives de la Province.

Le contrôle est réalisé par des moyens ou mécanismes légaux : 1. question orale ou écrite avec ou sans débat non suivi de vote, 2. la question d’actualité, 3. l’interpellation; 4. la commission d’enquête; 5. l’audition par les commissions. (Art 39 de la loi de libre administration des Provinces.)

De manière résumée, le contenu, la procédure et la finalité de chaque moyen de contrôle sont définis par le Règlement intérieur de l’Assemblée Provinciale. Ces 5 moyens de contrôle se ramènent à 3 techniques principales : les questions, les interpellations et les commissions.

En général, les questions consistent à recueillir les informations ou éclaircissement auprès de l’autorité responsable. Elles peuvent ou non entrainer les discussions entre leurs auteurs et l’autorité interrogée et peuvent aboutir aux observations.  

Par ailleurs, l’interpellation consiste à demander des justifications de l’autorité interpellée sur un grief mis à sa charge. Elle peut entrainer une discussion entre ses auteurs et tout autre député. Elle aboutit à une résolution ou une recommandation de l’assemblée provinciale. Lorsque les justifications n’ont pas été fournies ou quelles ont été non convaincantes, les députés peuvent initier la motion de retrait de confiance.

Enfin, les commissions sont des organes permanents ou occasionnels de l’assemblée, chargés des enquêtes et vérifications sur certains aspects de la gestion gouvernementale. Les commissions effectuent les enquêtes auprès des autorités, leurs services ou des tiers ayant interagis avec cette autorité ou ses services. Les Membres des commissions établissent des PV d’audition, les relevés des données et des constats. Les rapports de commissions de contrôle peuvent proposer à l’assemblée : des recommandations ou résolutions. Ils peuvent aussi servir de soubassement pour initier une motion de retrait de confiance à titre de sanction politique.

Il y a lieu de noter que le contrôle est soumis au principe du contradictoire qui veut tout motif d’accusation ou grief soit soumis préalablement à la personne incriminée qui bénéficie de temps suffisant pour présenter ses avis, considérations ou justifications.

Le contrôle est une garantie incontournable de bonne gouvernance. En tant qu’instance représentant le peuple, l’assemblée provinciale est appelée à veiller à ce que l’application des politiques publiques de la Province reflète les besoins du peuple[10] ; et pour y parvenir il faut contrôler le Gouvernement. L’objectif de contrôle est de : 1. Détecter et prévenir les abus, 2. Permettre aux gouvernants de rendre compte au peuple, 3. Éviter les dilapidations des moyens de la province, 4. Accroitre la transparence et la confiance du peuple, 5. sanctionner le gouvernement en dernier ressort.[11] Ainsi, l’assemblée provinciale doit bénéficier des moyens financiers, techniques et humains suffisants pour assurer régulièrement le contrôle budgétaire et le contrôle d’exécution des programmes de gouvernement.  

Outre les avis de satisfaction, les recommandations ou les résolutions, le contrôle peut aussi servir de soubassement des motions de censure ou de défiance en tant que procédure de sanction politique contre le Gouvernement.   

2°. La motion de censure ou de défiance contre le gouvernement ou un de ses membres.

La motion de censure est une procédure publique parlementaire par laquelle les députés prennent l’initiative de désavouer le Gouvernement et par voie de conséquence, le destituer.[12]

La motion de censure est donc le moyen le plus solennel pour une assemblée d’exprimer sa confiance ou sa méfiance envers le Gouvernement.[13] Lorsqu’une motion vise la destitution singulièrement d’un membre du gouvernement, elle est appelée motion de défiance. Toutefois, une motion de défiance contre le Gouverneur de Province entraine la destitution de tout le Gouvernement au même titre que la motion de censure. (Article 41 de la loi de libre administration des provinces)

À l’issu d’une procédure de contrôle ou d’office, un quart ou un dixième des députés provinciaux peut initier une procédure de motion de censure ou d’une motion de défiance. À l’occasion de ces procédures, le Gouverneur de Province ou le membre du gouvernement spécialement visé, est invité à présenter ses moyens de défense sur les griefs qui lui sont reprochés et ce, indépendamment des justifications qui auraient été données à l’occasion du contrôle parlementaire. En effet, la motion est une procédure techniquement indépendante des mécanismes de contrôle.  

Si la majorité des députés sont d’accord et vote pour la motion de censure ou de défiance, le gouvernement provincial ou le membre de ce gouvernement visé, est destitué. Si la motion vise tout le gouvernement ou le Gouverneur de Province, le gouvernement est réputé démissionnaire et le Gouverneur est tenu par l’article 160 de la loi électorale, de présenter la démission au Président de la République dans les 24h, sinon, la démission opère d’office. Le défaut de démission ne justifie pas la révocation du Gouverneur par de la République conformément à l’article 28 bis de la loi de libre administration des provinces.[14] Dans ce cas, l’administration électorale (CENI), saisit par le ministre national de l’intérieur, organise dans les 30 jours, les nouvelles élections du Gouverneur et de Vice-Gouverneur, pour le temps du mandat restant à courir.  En attendant, ces élections, l’équipe du gouvernement provincial sortant, conduite par le vice-gouverneur de province, expédie les affaires courantes[15].

En ce sens, les articles 41 et 42 de la loi de libre administration de province disposent respectivement ce qui suit.

Article 41 : « le Gouverneur de province peut, après délibération du Conseil des ministres, engager devant l’Assemblée provinciale la responsabilité du Gouvernement sur son programme, sur une déclaration de politique générale ou sur le vote d’un texte.

L’Assemblée provinciale met en cause la responsabilité du Gouvernement provincial ou d’un membre du Gouvernement provincial par le vote d’une motion de censure ou de défiance. La motion de censure contre le Gouvernement provincial n’est recevable que si elle est signée par un quart des membres de l’Assemblée provinciale. La motion de défiance contre un membre du Gouvernement provincial n’est recevable que si elle est signée par un dixième des membres de l’Assemblée provinciale.

Le débat et le vote ne peuvent avoir lieu que quarante-huit heures après le dépôt de la motion. Seuls sont recensés les votes favorables à la motion de censure ou de défiance qui ne peut être adoptée qu’à la majorité absolue des membres composant l’Assemblée provinciale. Si la motion de censure ou de défiance est rejetée, ses signataires ne peuvent en proposer une nouvelle au cours de la même session.

Le programme, la déclaration de politique générale ou le texte visé à l’alinéa 1er est considéré comme adopté sauf si une motion de censure est votée dans les conditions prévues aux alinéas 2 et 3 du présent article.

Article 42 : « Lorsque l’Assemblée provinciale adopte une motion de censure, le Gouvernement provincial est réputé démissionnaire. Dans ce cas, le Gouverneur de province remet la démission du Gouvernement au Président de la République dans les vingt-quatre heures.

Lorsqu’une motion de défiance contre un membre du Gouvernement provincial est adoptée, celui-ci est réputé démissionnaire.

Lorsqu’une motion de défiance contre le Gouverneur est adoptée, le Gouvernement provincial est réputé démissionnaire ».

À ces dispositions s’ajoute l’article 160 alinéa 2 et suivant de la loi électorale qui prévoit que « lorsque l’Assemblée provinciale adopte une motion, de censure, le Gouvernement provincial est réputé démissionnaire. Dans ce cas, le Gouverneur de province remet la démission de son Gouvernement au Président de la République dans les vingt-quatre heures.

Passé ce délai, la démission du Gouvernement provincial est d’office.

Le Gouvernement provincial, sous la direction du Vice-gouverneur expédie les affaires courantes.

Un nouveau scrutin est organisé par la Commission électorale nationale indépendante dans les trente jours de la notification du Ministre ayant les affaires intérieures dans ses attributions.

En cas de décès, de démission, d’empêchement définitif, de mise en accusation ou de révocation du Vice-gouverneur, le parti politique, le regroupement politique ou le Gouverneur indépendant concerné présente le candidat Vice-gouverneur dans les quinze jours à l’élection partielle.

A défaut de présenter le candidat Vice-gouverneur dans le délai prescrit, l’élection partielle est ouverte à toute candidature ».

Il ressort de ces dispositions que l’engagement de la responsabilité politique du Gouvernement de province devant l’assemblée provinciale peut être déclenché par le Gouverneur ou par les députés provinciaux.

En effet, le Gouverneur de Province peut estimer qu’un programme d’action, une déclaration de politique générale ou un projet d’édit doit être impérativement voté ou approuvé par l’assemblée provinciale pour qu’il poursuive ses fonctions. Dans ce cas, il le signifie officiellement à l’assemblée après délibération en conseil des ministres. En conséquence, si le texte sur lequel le Gouverneur a engagé la responsabilité politique de son gouvernement est voté ou approuvé par l’assemblée provinciale, le Gouvernement poursuit sa mission. En revanche, si ce texte n’est pas voté ou approuvé, l’assemblée est tenue de voter une motion de censure ou de défiance sinon, le texte est censé être approuvé.

Par ailleurs, lorsque les députés de leur côté estiment que le Gouvernement provincial n’exécute pas convenablement les programmes d’actions, la politique générale, les édits, les recommandations et résolutions issues de contrôle, ils peuvent initier la procédure de motion de censure ou de défiance en déposant le document de la motion au bureau de l’assemblée provinciale. Ce document de la motion doit être signé par 10% des députés au moins s’il s’agit d’une motion de défiance ou par 25% des députés provinciaux au moins s’il s’agit d’une motion de censure. Par exemple, si l’assemblée provinciale compte 26 députés provinciaux, il faut au moins 3 députés signataire du document de motion de défiance ou 7 députés signataires au moins pour validés le document de motion de censure contre le Gouvernement provincial. Le document de la motion devrait comprendre deux parties principales : les motifs (justifications) et le dispositif (décision stipulant que le Gouverneur, le vice-gouverneur ou le ministre provincial X est relevé de ses fonctions). Enfin, le document de la motion doit être daté, signé et mentionné les noms complets de ses auteurs.

Notons qu’aucune disposition légale n’oblige l’assemblée provinciale à notifier la motion au Gouvernement et l’inviter à présenter ses observations et justifications. Mais certains règlement intérieur des assemblées provinciales l’exigent expressément. Cependant, cela est une exigence fondamentale résultant du droit de la défense car la motion met en cause la responsabilité politique du Gouvernement provincial ou celle de son membre ; il est nécessaire que celui-ci s’explique et s’exprime publiquement à l’attention des députés et du peuple souverain. Toutefois, ces justifications peuvent être transmises par écrit ou présentées verbalement à la séance plénière de l’assemblée provinciale selon les prescrits du règlement intérieur ou le choix de l’autorité visée. Ainsi, le document de la motion (et ses pièces annexes s’il y en a) est notifié au Gouverneur ou au membre du Gouvernement concerné avec la date fixée pour le débat et vote de la motion. De même, les autres députés non-signataires de la motion doivent être notifiés du document de la motion et de pièces jointes avant l’ouverture du débat.

La séance du débat et vote de la motion est publique. La procédure doit être conforme au règlement intérieur de l’Assemblée Provinciale dont le bureau garantit la bonne application. Mais logiquement, la parole doit être donnée au représentant des députés initiateurs de la motion pour développer leur document, puis au membre du Gouvernement visé pour présenter ses justifications et observations et ensuite, s’ouvre le débat entre députés provinciaux. Enfin, le débat est clos par le vote et dépouillement de voix. Si les voix contre la motion sont majoritaires ou atteignent au moins moitié du nombre de tous députés provinciaux, la motion est rejetée et les signataires ne peuvent renouveler la procédure au cours de la même session. Aucun nouveau document de motion ne peut être signé par au moins un seul des signataires de la motion qui a été rejetée au cours de la même session.   

En revanche, si les voix pour (ou favorables à la motion) atteignent la majorité absolue ou soit plus de la moitié de tous les membres de l’assemblée provinciale, la motion est validée et il est dressé le Procès -Verbal de vote à annexer au document de la motion. Dans ce cas, ce document de la motion et le PV de son vote sont notifiés au Gouverneur et au Membre du Gouvernement Provincial concerné ainsi qu’aux autres autorités publiques auxquelles ce vote est opposable (CENI, Gouvernement central, Président de la République).

Le Gouverneur de Province ou le membre du gouvernement visé par le vote de la motion de censure ou défiance est, à compter de sa notification, irréfragablement considéré comme ayant démissionné. Mais lorsque la motion a visé tout le Gouvernement ou le Gouverneur de Province qui représente aussi le pouvoir central, celui-ci est tenu de remettre sa démission au Président de la République dans les 24heures. Passé ce délai, la démission opère d’office. Les nouvelles élections sont organisées dans le 30 jours par la CENI. Il est admis que le vote de la motion de censure étant un acte d’assemblée ayant force de loi, la cour constitutionnelle peut en contrôler sa conformité à la constitution et aux lois-écrans[16]. Dans ce cas, le juge constitutionnel vérifie simplement que la procédure de la motion est conforme ou non à la constitution, aux lois, édits et règlements d’exécution de la constitution.

3°. Dissolution des assemblées provinciales

Pour raison d’équilibre et de contrepoids contre le pouvoir de vote de motion de censure ou de défiance, la loi de libre administration de province prévoit la dissolution des assemblées provinciales. Selon l’article 19 de la loi de libre administration des provinces telle que modifiée et complétée en 2013 ainsi que l’article197 de la constitution révisée en 2011, « lorsqu’une crise politique grave et persistante menace d’interruption le fonctionnement régulier des institutions provinciales, le Président de la République peut, par une Ordonnance délibérée en Conseil des Ministres et après concertation avec les Bureaux de l’Assemblée Nationale et du Sénat, dissoudre l’Assemblée Provinciale. Il y a crise politique grave et persistante lorsque : 1. pendant six mois successifs, l’Assemblée provinciale n’arrive pas à dégager une majorité ; 2. elle ne peut se réunir pendant une session faute de quorum ; 3. au cours de deux sessions d’une année, le Gouvernement provincial est renversé à deux reprises. Dans ce cas, la Commission Electorale Nationale Indépendante organise les élections provinciales dans un délai de soixante jours à compter de la dissolution ».

À la suite de cette disposition on peut noter que le président de la République peut dissoudre une assemblée provinciale à condition qu’il y ait crise grave et persistante et qu’il consulte le président du Sénat et le Président de l’Assemblée nationale. La crise grave et persistante est définie par la loi comme correspondant à 3 hypothèses alternatives :

  1. Pendant 6 mois, l’assemblée provinciale ne dégage pas une majorité sur des questions importantes soumises à son vote. À notre sens, après l’élection du Gouverneur et Vice-Gouverneur, un groupe de députés majoritaire devrait faire une déclaration de majorité politique soutenant le Gouverneur de province. Faute de cette déclaration pendant les 6 mois qui suivent les élections et sur doléances du Gouverneur adressées au Président de la République, celui-ci peut constater une crise grave et persistante ; et par conséquent dissoudre l’assemblée provinciale.
  2. Pendant une session entière, l’assemblée provinciale n’a pas pu siéger et délibérer faute du quorum. Cette situation est proche de la précédente, elle suppose que les députés refusent de soutenir le gouvernement provincial en place et boycottent les réunions pendant toute une session parlementaire de 3 mois. Dans ce cas, saisi, par le gouverneur de province ou par le président de l’assemblée provinciale, le Président de la République peut dissoudre l’assemblée provinciale.
  3. Au cours de deux sessions d’une année, le Gouvernement provincial est renversé à deux reprises. L’assemblée provinciale tient 2 sessions au cours d’une année civile. Si l’assemblée provinciale renverse le gouvernement provincial et élu les nouveaux gouverneur et vice-gouverneur, ceux-ci ne peuvent plus être renversé au cours de la même année ; sinon, il y a crise grave et persistante en vertu de laquelle le président de la République peut dissoudre l’assemblée provinciale.

Comme on peut l’imaginer ces hypothèses sont rares. On ne voit pas pourquoi, après avoir élu un gouverneur, les députés qui l’ont élu peuvent catégoriquement refuser de soutenir son gouvernement ou même renverser le nouveau gouvernement au cours de la même année de la déchéance du gouvernement précédent.  De 2013 à ce jour (10 ans après), aucune assemblée provinciale n’a été dissoute par le Président de la République et aucune des hypothèses sus-évoqués n’a été renseignée. Ce contrepoids n’est en réalité qu’un tigre en papier. Ceci nous fait dire que la constitution du 18 février 2006 consacre en province, un parlementarisme déséquilibré car l’assemblée provinciale peut renverser facilement le gouvernement de la Province qui n’a aucune garantie de la stabilité.

I.3.2. LE GOUVERNEMENT PROVINCIAL

A° COMPOSITION ET MISSIONS.

Selon la constitution du 18 février 2006, le Gouvernement provincial est un organe collégial qui dépend de l’assemblée provinciale et du Président de la République ; et qui est chargé de gouverner la province dans les compétences qui lui sont dévolues par la constitution et les lois de la République. (Art 198 de la constitution et les articles 7 et suivants de la loi de libre administration des provinces).

Le gouvernement provincial dispose des moyens financiers et des services publics de la province pour l’exécution de son programme d’actions tel qu’approuvé par l’assemblée provinciale. Il appartient donc au gouvernement provincial de mettre en œuvre les édits provinciaux, le budget de la Province et le programme d’action approuvés par l’assemblée provinciale. À ce titre, le Gouvernement provincial : 1. élabore le projet du programme d’actions du Gouvernement secteur par secteur, 2.  Arrête le projet de budget des recettes et des dépenses, 3. Crée, organise et fait fonctionner les services publics de la province, recrute et encadre les agents de services publics de la Province, 4. Octroie des marchés publics et met en œuvre les actions inscrites dans le budget et le programme d’actions du gouvernement dûment approuvé, 5. Surveille et s’assure l’application des édits et des lois de la République sur l’ensemble de la Province, et 6. Répond politiquement de ses actes devant l’assemblée provinciale et devant le Président de la République  en ce qui concerne l’exécution des lois et des règlements du pouvoir central.

Le Gouvernement Provincial est composé de : 1. Gouverneur de Province, 2. Vice-Gouverneur et 3. Ministres provinciaux dont le nombre ne peut dépasser dix.

Le Gouverneur et le vice-Gouverneur sont élus pour un mandat de 5 ans par les députés provinciaux et investis par le Président de la République tandis que les ministres provinciaux sont nommés par le Gouverneur pour conduire un ou plusieurs secteurs bien définis de la vie publique provinciale. Le Gouverneur est le chef du gouvernement provincial ; il est remplacé par le vice-gouverneur en cas d’empêchement. Le Gouverneur de Province repartit les secteurs de la vie publique provinciale entre tous les membres du Gouvernement provincial. Le mandat du ministre provincial est politiquement lié à celui du Gouverneur de Province qui l’a nommé. Le gouvernement provincial se réunit régulièrement sous la direction du Gouverneur de province dans les réunions du conseil des ministres et y délibère sur les principales décisions et actions projetées par un de ses membres : projets de nomination des agents de services publics provinciaux, projets de budget de la province, projets des plans d’actions, projets d’octroie des marchés publics et de mis en œuvre des actions ministérielles, etc.

Il sied de noter cependant que le Gouvernement Provincial est d’une part, l’émanation de l’assemblée provinciale dans la mesure où les gouverneur et vice-gouverneur sont élus par les députés provinciaux. En outre, le programme d’actions du gouvernement pour la durée du mandat, doit préalablement être approuvé par l’assemblée provinciale et celle-ci peut retirer sa confiance au Gouvernement provincial ou à un de ses membres, par un vote de censure ou de défiance. L’investiture des ministres provinciaux est conditionnée à l’approbation par l’assemblée provinciale du programme d’actions du Gouvernement provincial. En d’autres termes, le Gouverneur de province doit politiquement être élu et soutenu par une majorité bien définie des députés provinciaux pour gouverner et se maintenir pouvoir.

D’autre part, le Gouverneur de Province dépend du pouvoir central et répond politiquement devant le Président de la République par l’exécution des lois et règlements de la Républiques. À ce sujet, l’article 206 de la constitution repris par l’article 71 de la loi de libre administration des provinces disposent clairement que « les Gouvernements provinciaux exécutent, par l’intermédiaire de leurs services, les lois et les règlements nationaux ». La loi confère ainsi expressément au Gouverneur de Province une double casquette : il est chef de l’exécutif provincial et le représentant du pouvoir central en Province.

B°. LA DOUBLE CASQUETTE DU GOUVERNEUR DE PROVINCE

1°. Chef de l’exécutif provincial. Le Gouvernement Provincial, en tant qu’exécutif, est chargé de mettre en œuvre un programme d’actions approuvé par l’assemblée provinciale. Le Gouverneur de Province dirige une équipe (gouvernement) chargée d’exécuter un ensemble d’actions bien libellées et approuvées par l’assemblée provinciale.

Dans ce sens, l’article 22 de la loi de libre administration des provinces, dispose que « le Gouvernement provincial est l’organe exécutif de la province ». L’article 28 de la même loi ajoute que « le Gouverneur est le chef de l’exécutif provincial. Il représente la province en justice et auprès des tiers. Il nomme, relève de leurs fonctions et, le cas échéant, révoque les ministres provinciaux. Il dispose de l’Administration publique en province. A ce titre, tous les services publics provinciaux et nationaux en province sont placés sous son autorité. Il promulgue les édits dans les quinze jours de leur transmission. A défaut, la promulgation est de droit. Sans préjudice des pouvoirs propres qui lui sont dévolus par les lois et les règlements nationaux ou les édits provinciaux, le Gouverneur agit par voie d’arrêté provincial délibéré en Conseil des ministres. L’arrêté est contresigné par le ministre provincial chargé de son exécution ».

Il ressort de ce qui précède que le Gouverneur de Province est chef de l’Exécutif provincial qui est chargé de mettre en œuvre le programme d’actions de la Province tel qu’il est approuvé par l’assemblée provinciale. À ce titre, le Gouverneur représente la Province en justice et devant le tiers, nomme et révoque les ministres, répartit les charges entre le vice-Gouverneur[17] et les ministres et s’assure de l’exécution de leurs tâches.

En tant que chef de l’Exécutif provincial, le Gouverneur de Province et son gouvernement provincial répondent devant l’assemblée provinciale de l’exécution du programme d’actions, du budget et des édits de la Province.

2° Représentant du chef de l’Etat et du Gouvernement central en Province.            En plus de sa qualité de chef de gouvernement provincial, le Gouverneur de Province est le représentant du chef de l’Etat et du pouvoir central en Province. À ce titre, le Gouverneur est, conformément aux dispositions des articles 61 à 71 de la loi de libre administration des Provinces, chargé de : 1. coordonner et superviser tous les services publics nationaux pour les matières des compétences exclusives du pouvoir central, 2. sauvegarder les intérêts du pouvoir central en péril dans la Province, 3. assurer le respect par tous des lois et règlements du pouvoir central en Province, 4. Faire rapport et répondre devant le pouvoir central de ses actes par annulation, réformation, substitution de ses actes ; et peut être révoqué par le Président de la République.

Selon l’article 198 de la constitution telle que révisée en 2011 et l’article 28 bis de la loi de libre administration des provinces telle que modifiée et complétée en 2013, le Gouverneur de province qui viole les lois et règlements de la République peut être révoquée par le Président de la République. Cette disposition édicte que « lorsqu’une crise politique grave et persistante menace d’interrompre le fonctionnement régulier des institutions provinciales, le Président de la République peut, par une Ordonnance délibérée en Conseil des ministres et après concertation avec les Bureaux de l’Assemblée Nationale et du Sénat, relever de ses fonctions le Gouverneur d’une province. Il y a crise politique grave susceptible de provoquer la fin des fonctions du Gouverneur de province lorsque celui-ci pose des actes contraires aux Lois et règlements de la République lesquels menacent ou interrompent le fonctionnement régulier des institutions politiques provinciales. Dans ce cas, la Commission Electorale Nationale Indépendante organise l’élection du nouveau Gouverneur dans un délai de trente jours ».

Il sied de noter qu’en vertu d’application du principe de séparation du pouvoir central et du pouvoir de province, l’assemblée provinciale ne peut nullement contrôler et sanctionner le gouverneur et le gouvernement provincial pour l’exercice de ses missions de représentation du pouvoir central. Dans ce cas, l’assemblée provinciale qui constate ces violations devrait saisir le président de la République. De même, le président de la République à son tour ne peut révoquer le Gouverneur de Province pour non-exécution du programme d’actions du gouverneur provincial conformément aux édits de la province. Dans pareil cas, le pouvoir central qui constaterait pareille situation doit saisir l’assemblée provinciale pour initier et voter les motions de censure ou de défiance.  L’article 67 de la loi de libre administration des provinces qui dispose que : « en cas de fautes graves commises par le Gouverneur de province dans l’exercice des missions des services publics déconcentrés, le pouvoir central peut (entre autres) saisir l’Assemblée provinciale pour faire application des articles 41 et 42 de la présente loi », est vidé de sa substance par la réforme de 2011 et 2013 qui confère au pouvoir central le droit de révoquer directement le Gouverneur de Province. (Les 41 et 42 précités renvoient au régime de motions de censure et de défiance contre le Gouverneur et les membres du Gouvernement provincial).

Comme on le voit, la stabilité du régime politique des provinces nécessite l’harmonie entre le Président de la République et la majorité politique à l’Assemblée provinciale car ces deux entités gèrent politiquement et concurremment le Gouvernement provincial. L’absence de cette harmonie peut entrainer une instabilité politique en Province ou un déséquilibre de rapport entre la province et le pouvoir central.

Dans la pratique, le Président de la République semble être distant (physiquement, politiquement et administrativement) des assemblées provinciales et ceci explique largement le désordre politique dans les Provinces. Les pratiques illégales de suspensions des plénières des assemblées provinciales par le Ministre national de l’intérieur ainsi que les interdictions indignes faites aux gouverneurs invités dans la capitale de retourner dans leurs provinces, ne sont pas de solution au problème mais des violations graves du régionalisme constitutionnel. En effet, ces pratiques annihilent la substance même de l’autonomie politique des provinces et les réduisent au rang des simples entités décentralisées sous tutelles du Gouvernement central.  

À notre sens, il incombe au Président de la République d’approcher et suivre au quotidien le fonctionnement des provinces par l’entremise d’un conseiller spécial en charge des provinces. Celui-ci peut être administrativement assisté par le secrétariat permanent de la conférence des Gouverneurs qui est naturellement rattaché à la Présidence. De la sorte, le président de la République serait informé au quotidien des réalités de chaque Province et maintenir le contact permanent avec les gouverneurs de province d’une part et les assemblées provinciales d’autre part.  Il peut ainsi harmoniser les vues avec les assemblées provinciales et les cas échéant révoquer les gouverneurs ou dissoudre les assemblées provinciales en toute responsabilité.

Par ailleurs, le régime politique des provinces implique la cohabitation entre les ministres provinciaux qui relèvent du pouvoir de la province et les chefs de services déconcentrés du pouvoir central en province (chefs de division, directeurs provinciaux, du même secteur).

C°. LA COHABITATION EN PROVINCE ENTRE LES MINISTRES PROVINCIAUX ET LES CHEFS DES SERVICES CONCENTRES DU POUVOIR CENTRAL

Le régime politique des Provinces tel qu’il est peint ci-dessus entraine une cohabitation susceptible de créer de confusion, entre le ministre provincial en charge d’un secteur et le chef de division provincial ou directeur provincial du même secteur d’activité. Exemples de Ministre provincial en charge de la santé et le chef de division de la santé ou le Médecin Inspecteur Provincial ; le Ministre provincial en charge de l’enseignement primaire et secondaire et le Directeur provincial de l’EPST ou l’Inspecteur Principal Provincial de l’enseignement ou encore le Directeur du SECEOPE ; le Ministre provincial en charge de la Justice et le chef de division de la Justice, le Greffier Principal ou le Directeur Provincial du Parquet général  ; le Ministre provincial en charge de Budget et le chef de division du Budget ; le Ministre Provincial des finances et le chef de Division des finances ; le Ministre Provincial des infrastructures et le chef de Division des infrastructures et Travaux publics, etc.

Il faut noter que le principe de séparation des pouvoirs central et provincial exclut toute idée de hiérarchie directe entre le ministre provincial et les chefs de services déconcentrés du pouvoir central en Province car, le premier est naturellement du pouvoir de la Province et les autres du pouvoir central de la République. En outre, les ministres provinciaux sont chargés d’exécuter le programme du Gouvernement Provincial tandis que les chefs de services déconcentrés du pouvoir central en Province sont chargés d’exécuter le programme et instructions du pouvoir central.

Cependant, il faut relativiser cette séparation, car, certaines des compétences de province sont encore dans plusieurs cas assurés techniquement par des services déconcentrés du pouvoir central en Province. C’est le cas par exemple des conservateurs des titres immobiliers qui sont des chefs des services déconcentrés du ministère national des affaires foncières alors que la délivrance et la conservation des certificats d’enregistrement sont des activités de la compétence exclusive de province. C’est aussi le cas des divisions d’habitat qui gèrent des Maisons de l’Etat du domaine privé alors que celles-ci relèvent de la compétence exclusive de la Province. On peut également évoquer le cas de la Division des affaires coutumières qui enregistrent et surveillent l’application des coutumes et conflits de pouvoirs coutumiers en Province alors que l’exécution des coutumes est une compétence exclusive de la Province. L’on peut aussi citer le cas des divisions de la santé qui reçoivent et traitent les dossiers des candidats qui postulent au ministère national de la santé alors que l’affectation de ces agents relève de la compétence exclusive de la Province. Etc.

Dans tous ces cas en effet, il est normal que ces services déconcentrés du pouvoir central en Province rendent compte aux ministres provinciaux chargé de ces questions car ils en sont politiquement responsables devant l’assemblée provinciale. Il incombe au Gouverneur de Province de communiquer à chaque chef de service déconcentré, les questions qui relèvent du Gouvernement Provincial dans son secteur et pour lesquelles ils dépendent du Ministre provincial en charge du secteur.   

En outre, même dans les domaines de la compétence exclusive du pouvoir central, les services déconcentrés sont coordonnés et supervisés par le Gouverneur de Province. Ce dernier peut charger ses ministres provinciaux de l’assister et le relayer dans la mission générale de supervision des services déconcentrés en Province. À ce titre, les ministres peuvent également surveiller l’exécution de lois par les services déconcentrés du pouvoir central en Province. Pour cela, il faut et il suffit que le Gouverneur de province, par des circulaires, explicite la portée du pouvoir de surveillance qu’il confierait à ses Ministres provinciaux.

Enfin, en vertu de la nature politique du statut des ministres provinciaux et de leur aptitude à suppléer le Gouverneur de Province le cas échéant, il doit être admis que tous les ministres provinciaux ont une préséance sur les chefs de services déconcentrés du pouvoir central en Province.

Toutefois, les ministres provinciaux ne peuvent aucunement se comporter comme des supérieurs hiérarchiques des chefs de services déconcentrés du pouvoir central en Province. Ils ne peuvent ni les suspendre ni les révoquer sans passer par les autorités compétentes.

Il appartient donc au Gouverneur de Province d’arbitrer les conflits possibles et coordonner la cohabitation des ministres provinciaux avec les chefs de services déconcentrés du pouvoir central en Province.

II. L’INSTABILITÉ DES GOUVERNEMENTS PROVINCIAUX PAR LES VOTES INTEMPESTIFS DES MOTIONS DE CENSURES OU DE DÉFIANCE

Depuis l’entrée en vigueur de la constitution du 18 février 2006, la majorité des gouvernements des provinces en RDC n’ont pas été stables ; les assemblées provinciales renversent fréquemment et à contretemps les gouvernements de leurs Provinces par des motions de censures ou de défiance. Certaines assemblées provinciales ont pu même renverser plus d’une fois les gouvernements de leurs provinces au cours d’une même législature. Cette instabilités des gouvernements provinciaux freinent sûrement le développement local pourtant visé par la forme régionaliste instauré par la constitution 2006.       Il y a lieu de s’interroger sur les vraies raisons de ces motions de censure et de défiance ainsi que sur l’importance même de l’institution « assemblée provinciale » avant de conclure sur la nécessité de sa suppression ou de son maintien pour l’avenir.

II.1. CAUSES DES MOTIONS DE CENSURES ET DE DEFIANCE INTEMPESTIVES CONTRE LES GOUVERNEMENTS PROVINCIAUX

L’observation attentive des fonctionnements des assemblées provinciales et des gouvernements provinciaux en RDC révèlent que, en dehors des rares cas des gouverneurs évincés pour raison de désaccord politique avec le chef de l’Etat contrôlant la majorité à l’assemblée provinciale, la plupart des motions de censures et de défiance, ont été soit pour motif de mégestion reprochée aux gouverneurs soit aussi pour des intérêts égoïstes des députés provinciaux.

Souvent, les députés provinciaux qui ont destitués les gouverneurs par motion de censure ou de défiance, ont reproché à ces derniers : le détournements ou malversation des fonds ou patrimoine de la Province, la gestion opaque des finances publiques de la Province ou encore l’incompétence et manque d’initiative. Dans la plupart des cas, ces motifs semblaient être fondés par les faits évoqués.

Cependant, une chose est certaine, les provinces sont des entités politiques qui ont besoin des gouvernements stables pour capitaliser les expériences et mêmes les moyens.[18]  En plus, le parlementarisme recommande la discipline du « fait majoritaire »[19] et le règlement politique des conflits susceptibles d’entrainer la crise au sein de la majorité au pouvoir. De la sorte, les renversements intempestifs des gouvernements peuvent s’analyser politiquement comme un manque de discipline politique et de contrôle de pouvoir au sein de la majorité politique. C’est ici le lieu de suggérer le contrôle et la consolidation de pouvoir de la majorité politique en Province comme ça se passe au niveau central. Cela nécessite d’une part, que l’organisation politique de la majorité au pouvoir soit matérialisée par des réunions politiques présidées par le Gouverneur de Province. D’autre part, le chef de l’Etat devrait rapprocher et suivre de près le fonctionnement de l’assemblée Provincial et celui du Gouvernement de Province. (Cfr supra I.2.d et I.3.2.B)

Outre ce qui précède, il est à noter que les députés provinciaux sont souvent accusés d’initier les motions de censures ou de défiance aux fins soit de mettre la pression sur le gouverneur pour obtenir des gains et des postes dans le gouvernements et services publics provinciaux ; soit pour se venger contre certaines décisions des gouverneurs qui auraient refusé de leur donner de l’argent ou de nommer les personnes qu’ils ont recommandées. Il est très difficile de confirmer ou d’infirmer ces hypothèses souvent vantées par les gouverneurs de provinces déchus.

Cependant, l’on se rend compte que les gouverneurs qui gèrent des provinces qui ont un peu de moyens financiers et souvent accusés de soudoyer les députés provinciaux, sont moins ou presque pas visés par les motions de censure ou de défiance.

En plus d’indiscipline politique qui contribue certes à l’instabilité des gouvernements provinciaux, il est important de combattre également la corruption des députés provinciaux qui s’impose actuellement comme mécanisme de stabilité des gouvernements des provinces.

A ce sujet, plusieurs voix s’élèvent pour réclamer la suppression des assemblées provinciales. Mais la vraie question est celle de savoir si les assemblées provinciales sont importantes dans notre système politique actuel car dans l’affirmative, on ne peut suggérer leur suppression.

II.2. IMPORTANCE DES ASSEMBLEES PROVINCIALES DANS LE SYSTÈME POLITIQUE EN VIGUEUR EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO

Pour certains analystes, les assemblées provinciales sont inutiles et « budgétivores » ; la République et les provinces peuvent fonctionner convenablement sans elles et en même temps faire des économies importantes. Cette position ne nous semble pas défendable pour des raisons évoquées ci-dessous.

A°- L’assemblée provincial est un élément fondamental du régionalisme politique instauré par la constitution de 2006. [20]

Les spécialistes sont quasi-unanimes sur le point que l’organisation territoriale de la République dans la constitution de 2006 est un régionalisme politique, plus proche du fédéralisme[21] que de l’unitarisme.

D’après ce système, rappelons-le, le pouvoir politique de l’État est reparti entre deux échelons : le niveau central qui gère tout le pays et le niveau régional ou provincial. Dans ce système, la constitution accorde au pouvoir de la Province des compétences propres distinctes de celles du pouvoir central. Ce pouvoir de la province est nécessairement législatif et gouvernemental. Le régionalisme est donc différent de la simple décentralisation territoriale. À ce sujet, Louis VAVOREU et ses coauteurs, écrivent que « dans l’État régional, l’autonomie accordée aux régions va plus loin qu’une simple décentralisation de l’Administration (régionalisation administrative). La régionalisation politique débouche quant à elle sur une dualité de sources normatives, sur la reconnaissance d’un pouvoir législatif régional et cette autonomie régionale se trouve en outre garantie par la constitution ».[22]

Il est donc techniquement absurde de soutenir la constitution de 2006 en RDC et plaider pour la suppression de l’organe législatif provincial ou pour l’instauration d’un organe délibérant non représentatif du peuple. Donc, pour supprimer les actuelles assemblées provinciales, il faut changer l’ordre constitutionnel en place et fonder une autre République.

En effet, il faut rappeler que selon l’alinéa 2 de l’article 220 de la constitution de 2006, « est formellement interdite, toute révision constitutionnelle ayant pour objet ou pour effet de réduire les prérogatives des provinces et des entités territoriales décentralisées ». Or, les assemblées provinciales sont une des prérogatives privilégiées des provinces dans l’ordre politique actuel. Donc, toute réforme ou révision de la constitution ayant pour but de supprimer les assemblées provinciales violerait fondamentalement l’article 220 de la constitution.

En plus de ce vient d’être dit, il appert de remarquer qu’au regard de la grande superficie du territoire, de l’explosion démographique et de la diversité ethnique dans la République, le régionalisme est la moindre forme adaptée de l’État, à défaut du fédéralisme plus couteux et susceptible de susciter chez les uns les sentiments sécessionnistes.[23] Les assemblées provinciales permettent aux provinces de résoudre plus rapidement les carences de législations et la représentation du peuple dans la province, sans devenir indépendant vis-à-vis du pouvoir central de la République.  Il est vrai que les assemblées actuelles n’ont pas encore atteint les performances requises compte tenu notamment de manque des moyens. Mais cela est dû au fait du pouvoir central qui refuse d’appliquer la retenue à la source de 40% au profit des provinces et la péréquation des 10% des recettes nationales (articles 175 et 181 de la constitution). Pour équilibrer les richesses et les niveaux de vie des provinces, nous estimons que la répartition devrait être de 30, 20 et 50%; c’est-à-dire 30% des revenus à caractère national retenue à la source pour les provinces, 20% pour la caisse nationale de péréquation et 50% pour le pouvoir central.

Au regard de ce qui précède nous pensons que la RDC a intérêt de conserver le régionalisme politique actuel et les assemblées provinciales qui en constituent l’élément fondamental quitte à elle de fournir simplement des efforts pour financer le fonctionnement et le développement des provinces.   

B°- L’assemblée Provinciale facilite la représentation des citoyens de la Province dans les élections indirectes des sénateurs et de Gouverneurs ainsi que dans le vote des lois de la Province.

Comme nous avons eu à le souligner ci-haut, les députés provinciaux et l’assemblée provinciale qu’ils constituent permettent la représentation citoyenne en Province. Il n’est pas pratiquement possible que ces fonctions représentatives soient exercées directement par tous les citoyens de la Province[24].

Par ailleurs, les élections des sénateurs et des Gouverneurs de province aux suffrages universels directs par les citoyens sont possibles et elles éviteraient même la corruption facile des députés provinciaux ; mais elles entrainent un coût d’organisation très élevé. Il serait pragmatique de combattre plutôt le fléau de la corruption par un programme bien ficelé, l’adoption et l’application d’une loi anticorruption.[25]

C°- L’assemblée provincial garantie la bonne gouvernance du pouvoir de la province par le contrôle.

Comme nous l’avons dit ci-haut, l’assemblée provinciale contrôle le Gouvernement de la Province, les services publics provinciaux et locaux sur l’exécution du programme d’actions, le budget, les résolutions, les recommandations et les édits de la Province.

Ce contrôle est une garantie très solide de la bonne gouvernance. Il existe certes d’autres organes de contrôle des finances et actions du Gouvernement de la Province, notamment les services administratifs spécialisés (exemple de l’inspection générale des finances) ainsi que la cour des comptes. Cependant, il faut faire observer que ces services ne sont pas établis en province pour exercer un contrôle permanent, régulier et de proximité. Le contrôle de ces services sont essentiellement basés sur les finances mais le contrôle de l’assemblée provinciale peut porter également sur les actions générales de l’Administration.

À ce sujet, nous proposons que les contrôles des assemblées provinciales soient principalement effectués par des commissions permanentes et de façon routinière. En effet, il suffit pour cela que les actes administratifs et financiers du Gouvernement soient régulièrement transmis aux bureaux de commissions permanentes appropriées. De la sorte, les services administratifs et techniques permanents des commissions peuvent exercer régulièrement le contrôle sous la supervision des députés provinciaux membres des commissions concernées. Ces contrôles seraient beaucoup plus efficaces et à moindre coût.

D°- L’assemblée provinciale est l’organe caractéristique de la Province

Il faut rappeler que la province comprend le pouvoir législatif exercé par l’assemblée provinciale et le pouvoir exécutif assuré par le gouvernement de la Province. Cependant, le pouvoir gouvernemental de la province est significativement inféodé par le pouvoir central au travers de la double casquette du Gouverneur de province et de la cohabitation des ministres provinciaux avec les services déconcentrés du pouvoir central.

Au fait, la double casquette du Gouverneur de province consiste en ce qu’il est d’une part, le chef du Gouvernement provincial dépendant principalement de l’assemblée provinciale et chargé d’exécuter le programme d’actions adoptés par l’assemblée provinciale. D’autre part, le Gouverneur de Province est le représentant du chef de l’État et du pouvoir central en Province. À ce titre, le Gouverneur de province et le Vice-Gouverneur sont investi par le Président de la République et en même temps chargés de coordonner et superviser les actions et services publics du pouvoir central en Province ainsi qu’exécutés les lois et règlements de la République. Cette situation fait que le Gouvernement provincial par l’influence du Gouverneur de province devient un organe hybridé du pouvoir central et du pouvoir de la Province. Cette hybridation s’élargit même aux autres membres du Gouvernement qui peuvent être chargés des missions du pouvoir central par le Gouverneur de province. On peut donc dire que dans une forte mesure, les gouvernements provinciaux dépendent du pouvoir central et casse par conséquent le clivage pouvoir central et pouvoir provincial.

En revanche, comme nous l’avons déjà épinglé plus haut, le pouvoir de l’assemblée provinciale relève fondamentalement de la Province et ne dépend aucunement du pouvoir central. C’est à tort que certains ministres nationaux du pouvoir central de la RDC se sont arrogé le pouvoir de recommandations et même de suspension à l’endroit des assemblées provinciales. Ces pratiques sont un coup dur porté au système politique en vigueur et qui doivent être éradiquées par le Président de la République et la cour constitutionnelle, chacun en ce qui le concerne.

En dehors du cas de crise grave et persistante entre l’assemblée provinciale et le gouvernement de la Province telle que définie par la loi, et dans lequel cas, le Président de la République peut dissoudre l’assemblée provinciale après concertations avec les bureaux de Sénat et de l’Assemblée nationale, il n’existe pas d’autres hypothèses d’intervention ou de coercition du pouvoir central à l’endroit des assemblées provinciales. La seule relation défendable est le rapprochement politique et administratif entre le Président de la République et les institutions politiques de la Province. (cfr. Supra I.3.2.B)

Comme on peut le voir l’assemblée provinciale telle qu’elle est organisée dans le régime politique de la constitution de 2006 en RDC, est l’organe caractéristique par excellence du pouvoir de la Province par rapport au pouvoir central et par conséquent, un élément important du régionalisme politique en place.

On peut retenir de tout ce qui vient d’être dit que l’assemblée provincial est un organe important du système politique instauré par la constitution du 18 février 2006. Elle exerce des missions importantes en dehors du pouvoir des motions de censure ou de défiance contre le Gouvernement de la Province. On ne peut donc pas suggérer sa suppression sans chambouler l’ordre politique actuellement en place.

Il faut rappeler que selon l’alinéa 2 de l’article 220 de la constitution de 2006, « est formellement interdite toute révision constitutionnelle ayant pour objet ou pour effet de réduire les prérogatives des provinces et des entités territoriales décentralisées ». Or, les assemblées provinciales sont une des prérogatives privilégiés des provinces. Donc, aucune révision constitutionnelle ne peut envisager leur suppression des assemblées.

Si l’on ne peut donc pas supprimer les assemblées provinciales dans cet ordre politique, faut-il alors suggérer la suppression de son pouvoir de vote des motions de censure et de défiance afin de stabiliser les gouvernements des provinces ? Nous pensons pour notre part, que pareil schéma serait peu orthodoxe d’autant plus que le gouvernement provincial doit dépendre de l’assemblée provinciale de qui elle émane. À la place, nous suggérons simplement la réforme du régime de motion de censure ou de défiance par l’exigence supplémentaire d’une ordonnance de destitution prise par le Président de la République.

II.3. REFORME DU REGIME DE MOTION DE CENSURE OU DE DÉFIANCE CONTRE LE GOUVERNEUR OU LE VICE-GOUVERNEUR PAR L’EXIGENCE SUPPLEMENTAIRE D’UNE ORDONNANCE DE DESTITUTION PRISE PAR LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE

Nous l’avons démontré précédemment, le pouvoir des assemblées provinciales de renverser le gouvernement de Province, a montré des limites en ce qu’il est à la base d’instabilité des gouvernements provinciaux et de forts soupçons de corruption des députés provinciaux. D’aucuns estiment que de nos jours, les Gouvernements provinciaux en RDC, travaillent essentiellement pour satisfaire les intérêts personnels des députés provinciaux.

S’il existe certes de cas des Gouverneurs destitués par motion de censure ou de défiance pour des raisons valables, il est dénoncé de temps en temps, des cas des motions de censure ou de défiance votées dans les procédures qui ne respectent pas le droit de la défense et d’autres qui n’avaient pas des raisons fondamentalement justifiées.

En guise de remède, nous suggérons que le pouvoir de vote de motions de censure ou de défiance contre le Gouverneur ou le vice-gouverneur ne puisse produire effet que si après ce vote, le président de la République prend une ordonnance de destitution sur base du dossier lui transmis par le bureau de l’Assemblée Provinciale.

De la sorte, les assemblées provinciales conserveront leur pouvoir de contrôle et de vote de motion tendant à la destitution du Gouverneur ou du Vice-gouverneur mais la destitution effective de ces autorités ne résultera que de l’ordonnance du président de la République prise dans un délai raisonnable. Cette ordonnance présidentielle destituant le gouvernement ou le vice-gouverneur de province, sera prise sur base du dossier lui transmis par l’Assemblée Provinciale.  

Donc, à la suite du vote de la motion de censure ou de défiance, le Bureau de l’assemblée provinciale concernée transmettra au chef de l’État, le plutôt que possible, le dossier afin de le destituer. Le Gouverneur de Province ou le Vice-Gouverneur visé qui conteste la démarche de l’assemblée, peut à son tour, transmettre au chef de l’État ses observations. Il peut aussi, s’il se reproche de quelque chose ou s’il ne bénéficie pas de la confiance politique, présenter la démission de son Gouvernement.

Ainsi, les manquements constatés par l’assemblée provinciales seront bien documentés dans le dossier transmis au chef de l’État pour la destitution éventuelle du Gouvernement, du Gouverneur ou du vice-gouverneur de province mis en cause. De cette façon, on aura évité l’arbitraire des députés provinciaux, il y aura moins de tensions au tour de la procédure de motion de censure et de défiance, plus de respect des procédures et de droit de la défense ainsi qu’une stabilité politique et administrative des gouvernements provinciaux.

La seule crainte dans un tel système est que les gouverneurs fautifs qui auraient changé de camp politique, de la majorité à l’assemblée provinciale vers l’obédience politique du chef de l’État, puissent bénéficier d’une grâce injuste et d’une couverture politiquement illégale de la part du Président de la République. Il est vrai que cette crainte est justifiée mais elle n’a pas assez d’importance; car le plus souvent la majorité politique dans les assemblées politiques soutiennent le chef de l’État et si ce n’est pas le cas, le rang du Président de la République et son influence, le placent au-dessus de la mêlée tel qu’il ne peut se compromettre à cause d’un individu Gouverneur de Province, soit-il un nouveau membre de son obédience politique.

En outre, le Président de la République n’a pas formellement des couleurs politiques mais a plus une personnalité, une dignité et des responsabilités à défendre.  À ce titre, on voit mal comment le Président de la République peut se complaire à protéger un Gouverneur dont les fautes sont étayées et établies. Et même si le Président de la République tombait dans une telle légèreté, il s’exposerait lui-même à la sanction politique de la population de la Province concernée lorsque celle-ci est favorable à la destitution du Gouverneur.

Sans nul doute, il y aurait plus de confiance pour tout le monde à se confier à la sagesse et l’appréciation du chef de l’État. Il serait donc évident que la déférence envers le chef de l’État amènera les parties à acquiescer généralement sa décision et éviter les procès juridictionnels inutiles après les votes de motions de censure et de défiance.

Par ailleurs, les avantages d’une telle réforme sont nombreux. Les députés provinciaux se verront obliger de mettre du sérieux dans la procédure de contrôle et des motions de censure ou de défiance pour que leur dossier transmis le cas échéant au chef de l’État ne soit pas rejeté ou infondé. De même, les gouverneurs qui ne se reprocheraient de rien, resteraient sereins en faisant confiance au chef de l’État et ne pourront pas céder aux sollicitations de corruption. En plus, le Président de la République peut se fier aux autres rapports de services techniques, administratifs ou juridictionnels disponibles pour contrevérifier les dénonciations à charge des gouverneurs mis en cause, notamment les rapports de l’inspection générale des finances, ceux de la Cour des comptes et les avis de son conseiller en charge des provinces.  Finalement, on aurait suffisamment stabilisé les gouvernements provinciaux, sans tomber dans l’impunité politique ni les procédures complaisantes.  

Du reste, il y a lieu de se demander si ce système de vote de motion couplé à l’ordonnance de destitution, serait conforme à l’orthodoxie du régime politique consacré par la constitution en vigueur ? D’aucuns se demanderaient comment un Gouverneur élu par les députés provinciaux devrait être destitué par une institution autre que celle qui l’a voté et ce, contrairement à la théorie des actes contraires et principe du parallélisme de forme (l’autorité qui nomme, c’est celle qui destitue dans les mêmes formes que celles de l’acte de nomination)?  

En réalité, ce système sera orthodoxe et conforme au régime politique en vigueur. En effet, quoiqu’élu par les députés provinciaux, le Gouverneur et le vice-gouverneur de Province n’entrent en fonction que sur effet de l’ordonnance d’investiture prise par le Président de la République. Ce n’est donc pas le seul vote des députés provinciaux qui confère au Gouverneur et au vice-gouverneur leurs pouvoirs mais aussi et surtout l’ordonnance d’investiture prise par le chef de l’État. De même, pour être destitué, il est orthodoxe, qu’en plus de vote de la motion de censure ou de défiance des députés provinciaux qu’il y ait également une ordonnance du chef de l’État.

En effet, le Gouverneur n’a pas seulement le pouvoir de la Province, mais aussi et plus encore celui du niveau central, il est donc anormal que les députés provinciaux ôtent au Gouverneur, le pouvoir du niveau central qu’ils ne lui ont pas conféré. Mathématiquement on dirait que pour qu’un gouverneur ou vice-gouverneur de province entre politiquement en fonction, il faut : un vote de l’assemblée provinciale + une ordonnance du chef de l’État ; De même, pour faire partir politiquement un Gouverneur ou vice-gouverneur, il faut la même chose : un vote de l’assemblée provinciale + une ordonnance du chef de l’État. Il n’est donc pas logique que le Gouverneur et le vice-gouverneur de province soient destitués par la seule volonté des députés provinciaux sous le regard impuissant du président de la République qui les a investis.

D’aucuns pourraient se demander pourquoi le Président de la République peut lui, par sa décision unilatérale révoquée le Gouverneur de province qui viole les lois et règlements de la République alors que l’assemblée Provinciale, elle, se verra refuser le droit de destituer le gouverneur qu’elle avait élu? Nous pensons en effet qu’en vertu du principe « qui peut le plus peu le moins » et des fonctions régulatrices du chef de l’État, cette position est amplement bien justifiée. En effet, le président de la République étant une instance supérieure à l’assemblée provinciale (qu’il peut même dissoudre), la décision du Président peut couvrir celle de l’assemblée provinciale mais l’inverse n’est pas normal. Aussi, l’on peut constater que depuis 2011 que cette disposition autorisant le Président de la République à révoquer le gouverneur est insérée dans la constitution et confirmée dans la loi de libre administration de provinces en 2013 (soit 10 ans après), le Président de la République ne l’a pas encore appliquée et à ce jour aucun Gouverneur de Province n’a été révoqué par lui contre plusieurs gouvernements provinciaux renversés par les assemblées provinciales. Il y a là la preuve que le Président de la République privilégie la stabilité des institutions aux intérêts partisans et égoïstes.

Ainsi, telle que décrite ci-haut, la procédure de destitution du Gouverneur ou vice-gouverneur par un vote de motion de censure ou de défiance avec exigence de l’ordonnance de destitution du président de la République, est très conforme à la constitution et à la logique du système politique en vigueur. Cette procédure ne peut donc pas être interprétée comme un privilégie retiré à la province car d’une part, les assemblées provinciales conservent leur pouvoir d’initiative et de vote des motions de censure ou de défiance et d’autre part, l’article 220 al 2 de la constitution qui interdit de retirer un privilège garanti à la province n’est pas énervé en ce sens que l’Assemblée provinciale n’est pas la province et qu’en réalité, aucune prérogative ne lui est retirée.

Au demeurant, ce régime de destitution par motion couplée à l’ordonnance du chef de l’Etat devrait être limité aux seuls cas de Gouverneur et Vice-Gouverneur de Province.

En revanche, les ministres provinciaux qui sont nommés par le Gouverneur de Province et investis par l’assemblée Provinciale, devraient être assujettis au régime exclusif des motions de défiance votées par l’assemblée provinciale qui les a investis.

Toutefois, il faudrait adapter la notion de la crise persistante entre le gouvernement de la province et l’assemblée Provinciale dans le chef cette dernière. Deux hypothèses doivent y être ajoutées : 1. Cas de vote d’une nouvelle motion de censure ou de défiance contre le Gouverneur ou Vice-Gouverneur dans les 6 mois qui suivent le rejet de la motion précédente par le Président de la République ; et 2. Cas de la situation de vote des motions de défiance contre plus de deux ministres provinciaux au cours de deux sessions consécutives. Dans ces deux hypothèses, comme dans les 3 autres déjà prévues à l’article 19 de la loi de libre administration de Province ; le Président de la République pourrait dissoudre l’assemblée Provinciale.   

Nous pensons que de la sorte, le parlementarisme régional consacré par la constitution du 18 février 2006 sera plus rationalisé et les Gouvernements provinciaux peuvent devenir de plus en plus stables.

Ainsi, au vu de ce qui vient d’être dit, il y a lieu de compléter l’article 198 de la constitution par un autre article 198 bis ainsi conçu : 

« Après le vote d’une motion de censure ou de défiance contre le Gouvernement provincial, le Gouverneur ou le Vice-Gouverneur, le Bureau de l’assemblée provinciale transmet le dossier au Président de la République.

Le vote d’une motion de censure ou de défiance contre le Gouvernement, le Gouverneur ou le Vice-Gouverneur de province ne peut produire d’effet que si le Président de la République, saisi par l’assemblée Provinciale, prend une ordonnance de destitution du Gouvernement ou du Vice-Gouverneur dans un délai de 10 jours à compter de la réception du dossier.

Passer ce délai, la motion est de nul effet. Il ne peut être initier une nouvelle motion poursuivant les mêmes effets qu’après au moins une période de 6 mois ».

CONCLUSION

Somme toute, on peut retenir en résumé que la province est un Etat-régional doté des pouvoirs constitutionnels distincts et séparés de ceux de la République et que, l’assemblée provinciale est l’élément fondamental et caractéristique de ce régionalisme. Le régime politique de provinces est donc un parlementarisme régional dans lequel l’assemblée provincial peut facilement renverser le Gouvernement de Province sans garantie de stabilité. Il faut et il suffit que le Président de la République se rapproche politiquement et administrativement des provinces pour y réguler le fonctionnement des institutions politiques provinciales.

L’instabilité des gouvernements provinciaux par les votes intempestifs de motions de censure ou de défiance, résulte plus de la lutte de satisfaction des intérêts égoïstes et personnels des députés provinciaux couplée au déséquilibre du régime politique des provinces. Il n’est donc pas nécessaire de supprimer les assemblées provinciales qui constituent un élément clé du régionalisme constitutionnel en vigueur ni de supprimer le pouvoir de motion de censure et de défiance des assemblées provinciales qui garantissent la représentation provinciale des citoyens et la bonne gouvernance.

Ainsi, la solution efficace peut provenir de la réforme de la procédure de vote de motions de censure et de défiance en conditionnant les effets de ce vote par une ordonnance de destitution prise par le président de la République dans un bref délai faute de quoi, le vote doit être de nul effet. Pareille réforme sera amplement en parfaite harmonie avec à la constitution. De la même manière qu’après l’élection des Gouverneur et vice-gouverneur par l’assemblée provinciale, il est exigé une ordonnance du chef de l’Etat pour qu’ils entrent en fonctions, le vote de motion de censure ou de défiante pour la destitution des Gouverneur et Vice-Gouverneur, ne peut mettre fin à leurs fonctions sans intervention de l’ordonnance du Président de la République.  Cette logique s’impose davantage du fait que le Gouverneur de province est investi non seulement du pouvoir de la Province mais aussi et surtout du pouvoir central.

Il y a donc lieu de modifier et compléter spécialement l’article 198 de la constitution par l’insertion d’un article 198 bis qui conditionne les effets de vote d’une motion de censure ou de défiance contre le Gouverneur ou le vice-gouverneur, par une ordonnance de destitution prise par le Président de la République. De cette façon, on aura construit un parlementarisme régional plus rationalisé.

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Mbujimayi, le 30 mai 2023

Par NSOLOTSHI MALANGU

Jurisconsulte, avocat et Chef de Travaux

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[1] Louis VAVOREU et consorts, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 21è édition, 2019, p.503

[2] Idem, p. 503

[3] Le préambule de la constitution du 18 février 2006 dispose clairement que « pour assurer une bonne harmonie entre les provinces elles-mêmes d’une part, et le pouvoir central d’autre part, il est institué une Conférence des Gouverneurs présidée par le Chef de l’Etat et dont le rôle est de servir de conseil aux deux échelons de l’Etat ». Le préambule de la loi organique n° 08/015 du 07 octobre 2008 portant modalités d’organisation et de fonctionnement de la Conférence des Gouverneurs de Province énonce que « la conférence est un cadre de concertation régulière entre les provinces et le pouvoir exécutif national. Sa mission est d’émettre les avis et de formuler les suggestions concrètes sur la politique à mener et la législation à élaborer. La conférence participe à la consolidation de l’unité, de la paix, et de la solidarité nationale et assure une bonne harmonie entre le pouvoir exécutif national et les provinces, d’une part, et celles-ci entre elles d’autre part ». Selon l’article 3 de la loi précitée « la Conférence est composée du Président de la République, du Premier Ministre, du Ministre de l’Intérieur et des Gouverneurs de province. Tout autre membre du Gouvernement peut y être invité ». Pour atteindre ces objectifs, le Secrétariat permanent de la conférence de Gouverneurs doit suffisamment travailler et apporter un appui technique au fonctionnement des provinces.

[4] Evariste BOSHAB et MATADI NENGA GAMANDA, le statut des représentants du peuple dans les assemblées politiques délibérantes : parlemantaires, députés provinciaux, conseillers urbains, conseillers communaux, conseillers de secteur ou de chefferie, Académia Bruylant, 2010, pp. 20-21

[5] Bob Kabamba, le régionalisme congolais, in processus de décentralisation en Rdc, étude menée sous la direction de Pamphile Mabiala Mantumba Ngoma, Fondation Konred-adenauer Stiftung, 2009, p.85 ; document en ligne : https://www.kas.de/documents/275840/5293160/KAS_D%C3%A9centralisation.pdf/3fa028f0-cf75-8233-7030-24f19180e63a?t=1568635632894

[6] Sebastien Melmoth, République démocratique du Congo : décentralisation et sortie de conflit, document en ligne :https://www.cairn.info/revue-afrique-contemporaine-2007-1-page-75.htm

[7] Notons que le préambule de loi sur la libre administration des provinces utilise le concept « régionalisme » pour qualifier le régime politique en Province. On peut lire dans ce texte ce qui suit : Le statut, l’organisation et le fonctionnement de la province procèdent des dispositions constitutionnelles qui instituent le régionalisme politique en République Démocratique du Congo, déterminent les institutions politiques de la province et répartissent les compétences entre elle et le pouvoir central (articles 3 et 195 à 206 de la Constitution).

[8] Ministère de l’intérieur RDC, Décentralisation en Bref, avec collaboration de CAPAC, pp29-32 ; document en ligne : file:///C:/Users/solbe/Downloads/116_DecentralisationEnBre_-_RDC_pdf_2013612_123145.pdf

[9] Union interparlementaire, Les outils du contrôle parlementaire : Etude comparative portant sur 88 parlements nationaux, document rédigé par Hironori Yamamoto, p.9 ; disponible en ligne : http://archive.ipu.org/pdf/publications/oversight08-f.pdf

[10] Union interparlementaire, Les outils du contrôle parlementaire : Etude comparative portant sur 88 parlements nationaux, document rédigé par Hironori Yamamoto, p.9 ; disponible en ligne : http://archive.ipu.org/pdf/publications/oversight08-f.pdf

[11] Idem, pp. 9-10

[12] El Hadj Mbodj, Théorie constitutionnelle, cours de 1ère année en Sciences juridiques, Faculté catholique de Bamako, Sénégal, p.89

[13] Bernard Chantebout, Droit constitutionnel, 26è édition, éd. SIREY, 2009, p. 226

[14] Selon l’article 28 de la loi de libre administration des provinces, « Lorsqu’une crise politique grave et persistante menace d’interrompre le fonctionnement régulier des institutions provinciales, le Président de la République peut, par une Ordonnance délibérée en Conseil des ministres et après concertation avec les Bureaux de l’Assemblée Nationale et du Sénat, relever de ses fonctions le Gouverneur d’une province. Il y a crise politique grave susceptible de provoquer la fin des fonctions du Gouverneur de province lorsque celui-ci pose des actes contraires aux Lois et règlements de la République lesquels menacent ou interrompent le fonctionnement régulier des institutions politiques provinciales ».

[15] Article 160 de la loi électorale

[16] On attend par loi écran, la loi qui reproduit la constitution. Lire à ce propos : https://aideauxtd.com/theorie-de-la-loi-ecran-ecran-legislatif/#:~:text=En%20Droit%20administratif%2C%20la%20th%C3%A9orie,reviendrait%20n%C3%A9cessairement%20%C3%A0%20reconna%C3%AEtre%20l%27

[17] En dehors de remplacement de Gouverneur, le vice-gouverneur n’a pas des fonctions spécifiques lui confiées par la constitution ou les lois ; il s’occupe des tâches lui confiées par le Gouverneur. Il peut être chargé d’un secteur ministériel précis notamment l’intérieur, les finances ou les infrastructures.

[18] Le départ d’un gouvernement entraine les dépenses colossales des indemnités de sortie du gouvernement sortant ainsi que des primes d’installations pour les membres du gouvernement entrant. À ces dépenses s’ajoutent les dilapidations des fonds par les membres sortants ainsi que les tâtonnements de nouveaux membres entrants.

[19] Louis VAVOREU et consorts, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 21è édition, 2019, p.774

[20] Jean-Louis Esambo Kangashe, Le Droit Constitutionnel, Académia, 2013, p72

[21] L UCIANO VANDELLI, DU RÉGIONALISME AU FÉDÉRALISME ? document en ligne, https://www.collegejuridique.ro/upload/documente/materielpedagogique/LicenceII/Document%2015.pdf

[22] Louis VAVOREU et consorts, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 21è édition, 2019, pp.504 et 505

[23] Evariste BOSHAB et MATADI NENGA GAMANDA, le statut des représentants du peuple dans les assemblées politiques délibérantes : parlemantaires, députés provinciaux, conseillers urbains, conseillers communaux, conseillers de secteur ou de chefferie, Academia Bruylant, 2010, p.20

[24] Evariste BOSHAB et MATADI NENGA GAMANDA, le statut des représentants du peuple dans les assemblées politiques délibérantes : parlemantaires, députés provinciaux, conseillers urbains, conseillers communaux, conseillers de secteur ou de chefferie, Academia Bruylant, 2010, p.13

[25] Nous menons présentement une étude scientifique sur le programme de lutte contre la corruption en RDC


NSOLOTSHI

Jurisconsultes, Avocat, Enseignant de Droit au niveau supérieur et universitaire et auteurs de plusieurs ouvrages et articles scientifique de Droit. Administrateur de la plate-forme jurisconsultes-rdc et du site internet www.jurisconsultes-rdc.net.

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